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Agression sexuelle, le photographe – Partie 1

Agression sexuelle - slogan - NXPL

Moi…

Je libertine depuis quelques mois. Je ré-explore ma sexualité, pour mon plaisir mais aussi pour une meilleure connaissance de moi même. Mes désirs, mes plaisirs, mon corps mais aussi mes limites.

Je suis femme. Née en France, dans les années quatre-vingt, dans la strate sociale moyenne. J’ai donc été élevée dans l’idée qu’il faut souffrir pour être belle, et qu’en plus il faut être belle. En plus, je suis belle. J’ai souffert.

J’ai appris malgré moi que le non pouvait être érotique. James Bond, Belmondo, Princesse Leia m’ont appris qu’une femme dit non puis qu’elle jouit sous les baisers brutaux d’un homme entreprenant et fou de désir pour elle. Je les déteste. A cause d’eux j’ai débuté ma sexualité en séduisant, en disant non, puis en acceptant ce que j’avais bien mérité, petite salope.

Heureusement, j’ai rencontré celui qui allait devenir mon époux. Amoureux et attentionné, je suis sortie de ce schéma pour découvrir avec lui d’autres scénarios de plaisir. C’est un homme bon et serein. Son style sexuel est animal, assez linéaire, prévisible, rassurant, convaincu, simple dans le désir et la communication de celui-ci. Je n’ai eu qu’à libérer ma sensualité pour prendre plaisir dans ses bras et surtout me sentir moi. Je l’en remercie. Je l’aime.

Pour l’embêter, je lui dit que sa vision du sexe est patriarcale, phallocratique. Mais c’est un peu vrai, elle est centrée sur le coït, et donc son plaisir. Quand il me caresse ou me lèche ce sont des « préliminaires » pour me préparer à son plaisir. Mes lectures m’ont fait comprendre que ce qu’il appelle préliminaires c’est déjà de la sexualité, que je peux ne désirer que les caresses, ou en vouloir aussi après, pendant, que le coït n’est qu’une option. Elle est certes très plaisante et je la prends souvent. Surtout avec lui, que j’aime.

Mon époux est formidable. Il me connaît, il sait que je suis fantaisiste, originale, énergétique. Et surtout il a confiance en lui, en nous, en notre lien. Alors il accepte que j’explore d’autres formes de scénarios, d’autres expériences sensorielles, corporelles, humaines, que je joue. J’ai des amants. Je libertine depuis quelques mois.

Mon libertinage…

J’ai fait de splendides rencontres. J’ai des amis virtuels. J’ai aussi trois amants très différents, qui me comblent, me font vivre ce que je suis, ce que j’aime. Et ils me font jouir terriblement.

J’ai de la chance. C’est ce que me dit une amie libertine. Elle a rencontré des queutards, des hommes qui ne veulent que baiser, pour leur plaisir à eux. Les hommes que j’ai rencontrés sont respectueux, sensibles, j’aime leur histoire, leur parcours, je respecte leurs besoins, leurs choix. Chacun à leur manière je les aime. Ce sont de belles expériences humaines. Je les quitte toujours le pincement au cœur de m’en séparer, et le sourire radieux de me sentir comblée, vibrante, libre et respectée. Le libertinage ne m’a offert que du bon. Jusqu’à hier.

J’aime de plus en plus mon corps. Je suis encore jeune, jusque quand le serai-je ? J’ai eu deux enfants, ils ont laissé leurs traces sur ma poitrine. Ma peau est un peu moins tendue sur ma chair, mais elle reste douce et sensible. Ces hommes aiment mon corps. J’aime mon corps. J’ai conscience que je ne devrais pas me contenter de la causalité qui unit ces deux phrases. J’y travaille. Mais pour le moment j’en suis là.

J’adore jouer avec mon corps, et notamment mon image. Clandestinement dans ma salle de bain je me prends en photo. Je me déshabille, je me mets en scène, je me cadre, mets un petit filtre sépia, un floutage des contours et j’envoie à mes amants. Ils adorent.

J’en veux toujours plus. Je me dis que mes photos sont belles. J’imagine qu’un photographe pourrait faire des images superbes. J’en parle à un de mes amants. Il me conseille quelqu’un. Un ami qui a sa confiance. Il me prévient. Si je cherche à coucher avec un photographe, ce n’est pas une bonne idée. Je lui dit que je ne veux pas d’un amant de plus, je veux des photos de moi, nue, belle et sensuelle.

Le photographe…

Le photographe en question dépasse mes attentes par sa longue expérience et la qualité de ses réalisations. Je suis impressionnée. Je ne sais pas si je suis assez jolie finalement. Je ne sais pas si  j’ai quelque chose à apporter. Il a déjà tout fait ! Mais quand je veux quelque chose, je n’ai pas peur de tenter. Et puis mon pétillement est unique, j’ai au moins cela à proposer, j’en connais la valeur.

Je le contacte. Comme je le sens un peu hors de ma portée, je fais ce que je sais le mieux faire. Je le séduit. Je lui envoie mes meilleures photos, un récit érotique, pour qu’il me connaisse. Je sens que je le touche. Je m’expose, je veux être modèle. Je n’ai pas peur de prendre des risques. Vivre c’est prendre des risques. Pauvre petite folle.

Je le rencontre, dans son atelier. Nous commençons par parler de nous longuement, je trouve cela formidable. Je lui raconte ma vie amoureuse, sexuelle. Mon nouveau cheminement. Il me parle de son couple actuel. De ses 20 ans de mariage révolu. Je le connais mieux. Et je me dis que mieux nous connaître donnera de la profondeur aux clichés. Je prends confiance. J’aime faire confiance. J’aime le réconfort et le soutien que cela me procure. Peut être trop, maintenant je m’en aperçois.

Je lui dit ce que j’avais imaginé comme photos. Nous sommes d’accord pour cocréer. J’apporte mes idées. Il propose quelque chose qui en découle. Parfait. Je ne veux pas que mon visage apparaisse. Ou alors sur les clichés sages, sans connotations trop sexuelles. Le diable se cache dans le « trop ». Il en déduit, qu’il ne prendra pas mon visage. Je le trouve prudent. Cela me conforte.

Je me lève pour prendre mon téléphone. Il saisit ma taille au passage. J’ai un léger mouvement de recul; Je ne sais si il l’a perçu. Moi si, mais je choisis de ne pas l’écouter. Après tout, c’est un mode d’accordage. Je ne pensais pas qu’il me toucherait physiquement. Mais finalement je consens, la connexion sera meilleure, les photos plus belles.

Il me demande ce que j’aime en matière de sexe. Je lui dit que j’aime être attachée. Et qu’on me fasse jouir aux moyens d’objets. C’est ce que me fait un de mes amants, celui qui m’envoie. Nous allons essayer les cordes ensemble à notre prochain rendez-vous.

Le photographe connaît bien les cordes. Il me dit que c’est dangereux. Il veut me protéger. Il me montre ce que mon amant ne doit surtout pas faire, les compressions sur mes poignets, au creux des biceps. Mon amant est consciencieux, il sait probablement tout cela.

Mais j’écoute, parce qu’il me fait peur. Il sort une corde pour me montrer. Il m’attache. J’aime. Alors je consens. J’ai un peu peur. Je lui dit : « Si je veux être détachée, tu le fais immédiatement n’est ce pas ? » Il me dit oui.

Dans mon esprit, je cherche mes armes, le pouvoir que j’ai alors que je suis attachée et privée de tous moyens physique. S’il me fait du mal, je peux ruiner sa réputation sur le net. Et je me souviens que mon amant lui fait confiance. Alors je fais taire la peur au fond de moi. Ou alors je l’érotise. Les cordes sont un jeu dangereux.

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L’abus sexuel…

Il parle beaucoup. Il me roule dans son langage, il semble savoir tant de choses, je ne sais tellement rien. Son appareil photo est à coté de nous. Il ne le prend pas. Il prend un vibromasseur. Je ne dis pas non. J’aime alors, je consens.

Aujourd’hui je comprends. Je ne veux plus cela. Je veux consentir avant d’aimer ! Je suis en colère! Je voulais être photographiée. Je ne voulais pas être baisée ! Il m’a baisée. J’ai aimé. Je me sens mal.

Il m’a dominée. J’aime être dominée. Deux de mes amants me dominent. Mais il le font avec amour. Ils le font pour moi. En pensant à moi avant eux. Le consentement, le respect. Lui m’a dominée, sans me demander avant, sans me demander mes limites. Il m’a manipulée.

Mais je me suis offerte, je l’ai même activement séduit. J’ai fait le numéro de la femme libre, forte et fragile à la fois.

Il a joué sur le quiproquo. Quand il m’a demandé ce que j’aime en matière de sexe. J’ai cru que c’était dans le but de me connaître pour me photographier. Mais c’était pour me prendre. Quand il m’a attaché pour me montrer, j’ai cru que c’était pour m’enseigner, que c’était pour me photographier. Mais c’était pour me prendre. Quand il m’a fait jouir, j’ai cru que c’était pour me photographier. Mais c’était pour me prendre.

Je voulais être prise en photo. Je me suis donnée de tout mon être. Je ne voulais donner que mon image. Je suis trop entière.

J’ai pris du plaisir. Cela a du l’encourager. Le plaisir ne doit pas se substituer au consentement. Le “oui” doit être préalable. D’abord on dit oui, après on en jouit.

Le plaisir ne doit pas se substituer au consentement

Ce vécu violent vient se juxtaposer à d’autres vécus.

Je déteste princesse Leia, James Bond, Indiana jones… Je me déteste aussi. Les fois où je me suis laissée faire, sans vouloir vraiment. Les fois ou activement, j’ai enfreint mon propre consentement. L’adolescente en besoin de réassurance, qui s’est faite sauter, pour sauter le pas, pour se sentir forte et capable, alors qu’elle ne le désirait pas vraiment.

La jeune mère au corps épuisé par la maternité qui donnait son corps à son mari pour ne pas le perdre. Qui voulait faire l’amour, alors qu’elle ne sentait plus rien, ni plaisir ni désir. Qui cherchait désespérément le plaisir en essayant de le forcer. De peur de ne jamais le retrouver. Qui n’acceptait pas d’avoir seulement besoin de temps.

Je me souviens de cette atroce sensation d’avoir excité mon époux en manque de tendresse. Et une fois son sexe dans le mien, ne rien sentir, ni envie ni sensation. Avoir besoin d’arrêter et de pleurer ce que mon corps me refusait. D’avoir peur de ne jamais prendre plaisir à nouveau. Mais ne pas arrêter le rapport. Un peu par curiosité, peut être le plaisir allait venir dans quelques minutes.

Et, plus je me crispais plus je m’effrayais. Puis je lâchais. Ça ne viendra pas, pas cette fois-ci. Mais je ne voulais pas décevoir mon mari, moi qui me décevais alors tant moi-même. Alors je m’absentais de mon corps, j’étais ailleurs et il finissait. C’était idiot. Il ne prenait plus vraiment de plaisir, il sentais que je n’étais plus avec lui. Mais il n’arrêtait pas non plus, peut-être croyait-il qu’il me retrouverait dans quelques minutes. Ou peut être qu’il se faisait quand même un peu de bien.

Je me sentais après tellement mal. Salie, violée. Comme ces centaines de femmes, comme ma propre grand-mère obligée au devoir conjugal. Je déteste ces hommes qui ont inventé cette loi, ce devoir. Mon propre grand-père qui m’a un jour lui même dit après le décès de ma grand-mère : « Tu sais, je crois qu’elle n’y a jamais pris plaisir ». Mais je me déteste encore plus pour me mettre dans ces situations. Je ne m’aime pas assez pour m’en protéger.

Ce n’est ni mon premier copain, ni mon mari, ni le photographe qui ont abusé de moi. C’est moi qui m’abuse.

Moi qui ne jouis jamais seule, peut être pour cela.

Il y a des jours comme aujourd’hui ou je me fatigue de moi même. Ou je me déteste pour le mal que je m’inflige. Ou je me demande ce que j’ai bien pu vivre à l’aube de ma vie ou dans mes vies précédentes pour m’infliger ce que je m’inflige, le désamour de moi même. J’ai du oublier de l’atroce, mais je sens quelque chose.

Il y a des jours comme aujourd’hui où je sais que je fais tout cela pour me soigner. Pour me fasciner moi même pour m’obliger à me voir, pour arrêter de me voiler les yeux sur qui je suis, sur le fait que je dois m’accepter et aussi le fait que je dois changer. Il y a des jours comme aujourd’hui où j’écris et cela me fait du bien.

J’aimerais arrêter d’avoir à me faire du mal juste pour m’autoriser à me soigner. J’y travaille.

Le photographe m’a manipulée, je ne sais pas si il l’a fait consciemment. Je ne sais pas qui est le plus dangereux pour moi même, de lui ou de moi. Cela aurait pu être pire, bien pire. Merci à l’univers de me l’avoir dit doucement. Et je vais rebondir. Je vais transformer, je le fais en ce moment même…

Témoignage à suivre dans la seconde partie …

Les articles de la série :

  1. Agression sexuelle, la mésaventure du photographe
  2. Agression sexuelle, l’abus ?, le déni
  3. Agression sexuelle, se soigner
  4. Agression sexuelle, reflexions sur le consentement

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