#29806
Epicture
Participant

Oui @Jieffe tu as très bien circonscrit la question. Deux choses a mon sens doivent être distinguées : premièrement les sensastions qui proviennent de notre corps, et qui sont vécues à l’instant présent par notre corps, par toutes les parties de notre corps, et deuxièmement la réflexion que nous menons sur ces sensations, en décalage temporel (même tres minime) avec elles. Notre esprit doit pouvoir, avec cette reflexion, cette pensée, construire un raisonnement qui lui permette d’en former une image mentale satisfaisant sa rationalité . La rationalité entendue comme cheminement de pensée cohérent qui permet d’aller d’un point a un autre, puis de revenir, comme on le ferait sur une carte geographique par exemple. La philosophie pointe du doigt, avec insistance, toute les petites incoherences de cette pensee, permettant peu a peu de les rendre, ou pas, plus coherentes.
Quand notre esprit, dont l’obsession est de former une image figée, stable, fiable, cohérente, s’attaque aux sensations corporelles, il rencontre un probleme : ces sensations, de part leur instabilité, ne se laissent pas saisir dans cette quete d’image stable. Pire encore, quand il pense y être parvenu, c’est déjà ailleurs. Cette incapacité est la source de l’angoisse qui peut avoir quelque chose d’effrayant.
Pour ce qui est du plaisir prostatique dont tu sembles dire qu’il permet justement de depasser cette problematique, je ne suis pas en mesure de dire si tu as raison. Je peux bien de me fier à ce que tu dis, mais ce n’est pas ce que je veux. Je veux le vivre. Mais je ne veux pas croire que je le vis, je veux pouvoir me dire que je suis en train de le vivre. Et pour l’instant, je ne sais pas si la jouissance dont Francois Jullien parle est de meme nature que celle dont toi tu parles, celle dont tous ceux qui sont ici parlent, car ce que je vis actuellement, c’est un accroissement de plaisir, certes de plus en plus élevé, mais je n’y reconnais pas la jouissance dont parle F Jullien. Et c’est tant mieux !
S’agit il d’ailleurs d’une jouissance? Jouir au sens premier n’est il pas user de quelque chose que lon possède? La possession est aux antipodes de ce que nous ressentons, nous explorateurs prostatiques. Nous sommes plus possédés que possédant, nest-il pas ?
C’est peut être justement de là que vient la grande difficulté de certains (dont moi) à se laisser porter par ses sensations : le desir d’une jouissance qui serait un aboutissement, une fin, un terminus, un état d’âme ultime et indépassable.
Ce n’est pas ce que mon plaisir me dit que je vis a travers le massage prostatique. C’est plutôt un voyage sans fin, dont l’altitude augmente peu a peu. Il n’y a pas d’atterrissage, il n y a que montées et descentes. C’est un vol sans autre destination que les hauteurs du plaisir.
Bises à toi et à tous les lecteurs