#30230
Epicture
Participant

Bonjour à tous !

Il est temps d’alimenter un peu ce fil de discussion.
La faiblesse de mon écriture sur ce fil tient à une raison principale : la crainte d’ennuyer, car quand on prononce le mot philosophie, déjà les mâchoires s’ouvrent, et l’on entend bailler, même ceux qui ne sont pas dans la pièce.

Pourtant, le massage prostatique va bien au-delà d’une simple technique visant à se donner du plaisir via quelques instruments destinés à remplir la cavité anale. Il ne met pas seulement en route un processus d’accès au plaisir, mais aussi un processus d’accès à soi-même en tant qu’être vivant. Ces deux processus s’activent conjointement, et s’auto-alimentent mutuellement. “Soi-même”, (ou le sujet), est une question philosophique, qui est diluée de ci, de là, dans le contenu de ce site, bien que quelques articles (je pense à l’approche sociologique de la sexualité, et à cette expérience tantrique que nous a relaté @adam) et quelques anéronautes dont @andraneros, ouvrent la voie. Il est très difficile de discerner ce qui est de l’ordre de la technique du travail du corps, et ce qui est de l’ordre du travail de l’esprit, de l’accès à soi-même, de la construction mentale.

Il faut donc trouver un angle de perspective qui soit quelque peu attrayant, et c’est cela que j’ai eu de la peine à trouver.

J’ai trouvé la solution, grâce à François JULLIEN, dont j’avais par ailleurs conseillé le visionnage d’une vidéo sur le thème de la jouissance. Cette vidéo, bien que très intéressante est assez difficile d’accès pour ceux qui ne connaissent rien ni à la philosophie, ni à la psychanalyse.
Mais ce philosophe a la particularité de mettre en rapport la culture occidentale et la culture chinoise, dont le taoïsme, est originaire.
Il me semble, que en tant que philosophie, le taoïsme aborde de façon radicalement différente des occidentaux, la question de la sexualité, et ce indépendamment de toute considération religieuse.
Et François JULLIEN, dans un article intitulé “L’indifférence à la psychanalyse”, décrit la distinction que l’on peut faire entre la pensée chinoise et la pensée européenne comme un écart fondamental dans l’idée de corps et d’esprit. En effet, alors que la pensée occidentale est “forgée” sur la dualité corps/esprit, la pensée chinoise est forgée sur la notion d’énergie, ou qi (prononcer tchi)

En voici quelques extraits : https://www.cairn.info/publications-de-Jullien-Fran%C3%A7ois–9105.htm

“L’autre indifférence, qui me paraît massive du côté chinois, tiendrait à l’indéfinition du sujet, de la figure du sujet.(…)
il n’y a pas dans la tradition chinoise de notion d’âme en tant qu’instance indépendante. S’il n’y a pas d’âme, en Chine, il n’y a pas non plus de corps.(…) Il n’y a qu’une vérité au fond, c’est le qi, le souffle, l’énergie, et ce souffle-énergie, soit il se décante, s’allège, s’assume, et cela forme une dimension d’esprit ; soit il s’opacifie, coagule, et il forme les corps.”

“La philosophie ne s’est jamais intéressée à la respiration, elle a toujours commencé par la même chose, la perception, parce que pour elle le rapport du corps au réel passe par les organes comme des objets de connaissance, plus ou moins bons, souvent jugés très mauvais, parfois acceptables, mais le corps est vu dans sa particularité de perception.(…) Le corps chinois, lui, n’est pas perceptif. Il est d’abord respirant parce qu’il est comme le monde, il est souffle, énergie : qi.”

“Toute la pensée chinoise est une réflexion sur le maintien d’équilibre, de cohérence, à travers le continuel changement des choses. En même temps, quand on dit processus, régulation, harmonie se maintenant à travers de constantes variations, ce qui fait écart par rapport à la tradition européenne, c’est qu’un processus n’a pas de finalité. Sa régulation, c’est qu’il se perpétue, mais sans finalité : il ne tend vers rien.”

Nous savons maintenant pourquoi la reprise par des occidentaux, de pratiques taoïste à tendance à dériver vers une finalité précise. Alors que le processus de toute pratique taoïste, ne tend vers rien, c’est à cette condition qu’elle peut devenir processus.
Nous sommes tellement conditionnés que notre pensée rencontre énormément de difficulté à élaborer un processus sans finalité.

Ne vous méprenez pas ! Mon objectif, (et oui j’en ai un malgré tout), ce n’est pas de faire de la philosophie “philosophienne”, mais de trouver la bonne disposition intellectuelle, mentale, pour que le moment venu, le plaisir m’emporte sur son tapis volant !

Peut être la solution est-elle là :

“Il y a chez Confucius cette autre formule fort belle : “J’aimerais ne pas parler.” Et ses disciples lui disent : “Mais si vous ne parlez pas, qu’est-ce qu’on va faire, qu’est-ce qu’on va raconter ?” Et il dit : “Les saisons suivent leur cours, tous les champs prospèrent, quel besoin le ciel aurait-il de parler ?”

Je vous laisse réagir !