#42487
bzo
Participant

j’ai été dans la forêt aujourd’hui,
c’est la première fois que j’y allais un dimanche et je dois dire, sans doute la dernière,
je préfère encore ne pas y aller, il y avait vraiment trop de monde

je n’ai rien contre les gens, je ne suis pas un ermite misanthrope
mais la forêt, je la veux pour moi tout seul, le plus possible,
j’ai besoin des arbres, des sentiers, des feuillages
mais aussi du silence,
sans elle, la forêt n’est pas tout à fait, la forêt,
même pas du tout

ce silence qui est comme une matrice fertile,
aujourd’hui, il était strié, sillonné des voix des promeneurs du dimanche,
comme un gruyère, il ne ressemblait plus à grand chose,
ce silence de la forêt dans lequel j’aime tellement plonger,
un jour, il mettra bas, je serai parvenu à le féconder de mes énergies

mais aujourd’hui, vraiment, il n’y avait vraiment pas grand chose à faire,
la forêt ne m’appartenait pas, je m’en sentais dépossédé,
j’étais extrêmement frustré,
je m’asseyais sur un tronc abattu pour me plonger dans la contemplation des arbres
et à peine, avais-je le temps d’un peu m’y atteler
que des gens arrivaient sur le sentier, parlant haut

des enfants, ça va, les enfants ne me dérangeront jamais,
leurs voix sont comme des chants d’oiseaux
mais les adultes, je ne sais pas pourquoi, ils se sentent obligés de parler haut en forêt,
ils devraient plutôt murmurer comme s’ils parcouraient une cathédrale
mais non, les gens se sentent obligés de parler haut par ici
comme s’ils avaient peur de ne pas se faire entendre,
alors qu’il n’y a aucun bruit aux alentours qui puissent interférer,
aucun brouhaha, aucun vrombissement de voitures

non, c’est le contraire, je crois, c’est le fait que la forêt baigne dans le silence
qui les incite à parler plus haut,
c’est le silence-même qu’ils veulent être sûr de couvrir, de transpercer, avec leurs voix,
comme s’ils avaient peur qu’il avale leurs paroles comme des sables mouvants,
avant que leur interlocuteur ait eu le temps de les entendre,
alors ils haussent le ton
et on les entend de partout à la ronde

des tas de promeneurs criards qui sillonnent dans toutes les directions, la forêt,
les oiseaux en restent cois dans les feuillages,
tous les animaux se replient dans leur terrier, leur antre, leur buisson,
en attendent que ce déluge sonore passe,
que le calme majestueux reprenne possession des lieux

vivement que je puisse reprendre mes promenades , le mercredi,
quasi pas un chat ce jour-là