je suis très slow sexe, ces derniers jours,
j’ai déjà eu plusieurs fois des périodes comme cela
où mes gestes semblent se ralentir de plus en plus,
marquant des temps d’arrêt, régulièrement,
des haltes comme des transitions, des ressourcements, des recentrements,
comme de la ponctuation rythmant l’action
à chaque fois, cela s’impose à moi, avec toujours plus de force,
un jour, je resterai complètement dedans,
adopterais définitivement, cette manière de pratiquer,
tout simplement parce que je ne pourrai plus faire autrement,
tellement elle me sera devenue une évidence,
sera devenue inévitable
ce qui me frappe cette fois-ci, tout particulièrement,
c’est à quel point,
cette manière permet de se rendre compte,
que les sensations ont un cycle,
qu’elles naissent,
parfois dans la douleur mais ça, c’est une autre histoire,
montent en puissance, grandissent, s’enrichissent,
arrivent à maturité,
plafonnent quelque instant, délivrant leur ineffable cocktail
puis enfin déclinent et s’éteignent
eh bien, le slow sexe,
permet de vivre ces cycles, au plus près,
de ne pas en rater une miette,
d’en suivre la moindre des fluctuations
ces cycles, pour chaque sensation,
ne durent, au mieux, que quelques secondes
mais si on parvient à bien se mettre à écoute,
on prend conscience de leur existence en soi
et on apprend à en goûter, les nuances, à chaque stade,
toutes ont leur spécificité
qui valent vraiment la peine d’être appréciée comme il faut
suivre la nage d’une sensation, de sa naissance à sa mort,
bien la respecter, bien la laisser se dérouler,
c’est percevoir le rythme immémorial de leur brève évolution,
leur aura d’harmonie sauvage,
en nous
c’est percevoir, en fait, tout le cycle de l’énergie
qui attisée par le désir,
se transforme dans la cornue de l’alchimiste
quand c’est trop précipité,
on ne laisse pas le temps aux sensations de bien se développer,
de nous délivrer leur quintessence,
les fleurs capiteuses, n’ont pas le temps de s’ouvrir,
à peine une nait, s’élance,
que déjà on convoque la suivante
et ainsi de suite,
on perd la plupart de ce que l’on porte à sa bouche,
on se bafre frénétiquement, on en met plein à côté,
avalant à toute vitesse, percevant à peine les saveurs
alors qu’en accentuant la lenteur,
en adoptant, ce que j’appelle, le rythme des profondeurs,
le rythme flânant des poissons des abysses,
on favorise grandement l’écoute de soi,
des abîmes vont naître et s’entrouvrir,
on installe une forme de silence dans la chair,
que les sensations vont déchirer les unes après les autres,
comme des chants d’oiseau,
lancés depuis des branches dans l’invisible
dans une chair qui ne se laisse pas aller à la frénésie de la précipitation,
qui se freine juste ce qu’il faut, pas plus, pas moins,
la dégustation est favorisée plus que jamais,
chaque sensation semble comme une gorgée de vieux vin
arrivée dans la gorge,
qu’on garde là, un temps,
qu’on roule entre ses joues, entre ses lèvres,
pour en libérer toutes les arômes
rien ne nous échappera
car nous étirons le temps,
le temps qu’il faut,
le temps qu’il faut pour pouvoir être pénétré
de toutes les nuances qui s’échappent de la sensation,
le temps qu’il faut, pour que nos papilles soient à la fête,
le temps qu’il faut, pour que nos papilles aient droit à leur orgie
et quand l’orgasme arrivera,
le moteur sera vraiment arrivé vraiment à pleine puissance,
prêt à délivrer tout ce qu’il a dans le ventre