mon cher petit coeur,
tu t’arrêteras de battre un jour, je sais bien,
j’espère que ce sera rapide, propre,
qu’en quelques secondes, je ne serai plus là,
que ce sera net, clair, sans trop de combat,
d’essayer de se retenir, de s’empêcher glisser,
sur la pente vers le vide, vers le rien
qui s’accentue inexorablement
en attendant, mon cher petit coeur,
je vais apprendre à t’écouter battre avec plaisir,
je vais transformer cette capacité que j’ai à t’écouter rebondir dans ta cage,
pompant et encore pompant le sang
c’était au point, même que je le sentais circuler,
je sentais son flux dans les veines et artères, à ta proximité,
je vais apprendre à prendre tout cela du bon côté, plus tôt,
le côté de la vie,
le côté mécanique miraculeuse,
le côté de la chair en fonctionnement
en attendant, assis à mon bureau, les pieds sur la table,
je laisse glisser un peu, la main sur ma peau,
immédiatement, je suis envahi de frissons,
je presse un peu les génitaux, avec les cuisses
et je fais monter une contraction, bien lentement,
oh mon cher corps, comme tu réagis au quart de tour,
comme je suis envahi de la tête aux pieds et jusqu’au fond de l’âme,
de vagues ineffables
merci, mon cher petit coeur
et de bonnes et nombreuses années, encore par devant toi,
par devant nous,
j’espère,
à déguster les instants, à nous déguster, à déguster ce monde,
en même temps, si beau et si laid,
si merveilleux et si cauchemardesque