ce matin,
je me suis réveillé une heure et demie
plus tôt que le réveil
et j’en ai profité,
ah comme j’en ai profité!
vécu une expérience tellement splendide
bien longtemps
que je n’avais plus pratiqué aussi longuement,
une heure et demie,
enfin si on peut appeler cela, pratiquer,
tellement c’était atypique,
j’appellerai cela plutot
une sorte de danse du plaisir, à l’horizontale,
en communion totale avec mon corps,
cela me parait plus correspondre
comment décrire?
par quel bout commencer?
d’abord,
le féminin semblait constamment murmurer,
à l’oreille de mes cellules,
“je me suis marié à l’éclair pour toi,
profite-en au maximum,
prends ton temps, prends ton temps”
et j’ai pris mon temps,
comme j’ai pris mon temps
rarement pris autant mon temps
et mon pied, aussi ,
que ce matin, sous le drap
eh oui
s’il fallait placer
sous le patronage d’un seul terme,
cette séance tout à fait inhabituelle,
c’est celui de l’éclair
l’éclair était infiniment habitable
dans ma chair, ce matin,
éblouissement en continu,
impression de lumière chaude et soyeuse,
jusque dans le plus intime,
de la chambre noire
trépidante, terrible puissance, de l’éclair,
dans ma chair
mais finalement m’obéissant docilement,
se laissant mener
au gré de mes mouvements divers,
de mes contractions, de mes ondulations
je ne veux même pas employer le terme de caresse,
les doigts, la paume, certes,
par moments, se déplaçaient sur la peau
mais ce n’étaient vraiment pas des caresses,
des contacts, des pressions, des frottements,
qui ne cherchaient en aucune façon à être agréables
juste qui dialoguaient intensément,
qui étaient en quête,
qui faisaient partie de la grande harmonie sauvage
qui se déroulait voluptueusement sous ma peau
un mustang de lumière,
trépidant terriblement, se cabrant soyeusement
mais acceptant mon rythme lent,
et mes temps d’arrêt
la musique se dégageait majestueusement,
omniprésente, avec une telle netteté
mais en même temps, tellement légère,
c’était un jeu, vraiment,
un jeu entre mon corps et moi
une heure et demie,
d’une sorte d’extase en continu,
d’une puissance que je n’avais encore pas vécue jusqu’ici
les sensations étaient tellement fortes, tellement omniprésentes,
tellement variées
confondant, confondant,
confondant et émouvant
quelque part, aussi
j’étais aussi un écolier sur son banc
qui ne perdait pas une miette de ce qui se passait,
qui amassait tout dans sa mémoire
pour pouvoir reproduire cela
dans le futur
j’ai les clefs,
oh comme cela me fait frissonner
de toutes parts,
rien que d’y penser