dans l’obscurité, sous les couvertures, bien au chaud,
le monde extérieur n’existe pas,
il n’y a que moi, moi et moi,
tous les moi sans aucun des systèmes de défense
quand on est face au monde,
tout un potentiel d’émoi, émoi, émoi
ce matin, ainsi, j’ai vécu une expérience sensorielle superbe,
une expérience de plaisir sans volupté, sans sexuel,
cela a commencé par mon avant-bras
que j’ai commencé à déplacer très très lentement
sur ma cuisse
(j’étais en position de chien de fusil,
ma position habituelle au lit quand je ne pratique pas),
j’ai senti des ondes qui ont commencé à circuler,
c’était agréable,
pas sexuel mais agréable
en quoi consistait ce plaisir non sexuel mais néanmoins très puissant?
j’ai analysé cela après coup,
c’était le simple fait de sentir mon corps et mon esprit uni,
ne former plus qu’un,
un seul espace, comme une scène , du terreau ultra-fertile
où toutes sortes de choses peuvent bourgeonner instantanément
et où circulait des énergies à l’état pur,
sans qu’elles se transforment encore en volupté
elles circulaient tantôt sous forme de flammèche ondulant,
tantôt leur masse prenait de la consistance du volume,
devenait un serpent épais zigzaguant à gauche, à droite,
tantôt carrément leur cours, leur flux,
occupait tout mon être
l’important était d’avoir constamment un cours, un rythme,
parfois tout menu, tout menu
et à d’autres moments, massif, gigantesque
et pour cela, je laissais bouger, contracter, frotter, effleurer
en toute spontanéité et improvisation,
juste je suivais le flux, me laissais entraîner par celui-ci
au bout d’un moment,
je me sentais de plus en plus sûr de ce qui se passait, comment cela devait se passer
et je laissais même mes génitaux, ma prostate , mes seins, participer
sans que cela devienne sexuel,
toujours rester dans de l’énergie pure,
je sentais le seuil au-delà duquel cela se transformerait en volupté,
je jouais avec, je laissais même un peu mordre dessus
puis je redescendais,
je continuais en sensation non-sexuelle
je faisais du rase motte en quelque sorte,
je restais toujours en-dessous de l’altitude au-delà de laquelle
les radars du sexuel détecteraient l’action
et se mettraient en route toute la machinerie du plaisir
par moments, je m’amusais à flirter avec,
vraiment venir titiller cette frontière, tournicoter dessus,
sentir un bref départ de volupté
puis immédiatement redescendre en altitude
et juste goûter aux énergies se déplaçant en moi