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Les risques dans le BDSM – BDSM et libre arbitre

BDSM et libre arbitre

Dans la série, réflexions et risques dans le BDSM, voici le cinquième article. Cet article est un article de réflexion sur le BDSM et l’impact de ces activités sur le libre arbitre et le consentement dans le temps. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse aux questions qui sont posées, chaque relation BDSM étant unique.

Comme nous avons vu dans les articles précédents et spécifiquement le quatrième, les activités dans le BDSM ainsi que les techniques utilisées, que ce soit consciemment ou inconsciemment, par les Dom ont, en partie, pour but le conditionnement à la soumission des Soum. 

En effet, nous avons vu que derrière les activités BDSM et dans certaines conditions, des processus physiologiques puissants de conditionnement (type Pavlov en outre) mais aussi de Brainwashing (utilisation de la dissociation liée à la douleur par exemple), etc. interviennent lors des interactions et activités.

Si l’on prend du recul, il se pose alors la question du consentement et du libre arbitre dans la durée pour le Soum. Cette question se pose plus spécifiquement de mon point de vue dans le BDSM 24/7 puisque étant par définition une prise de contrôle continue dans le temps par le Dom.

Rappel sur la série sur les risques dans le BDSM

Le BDSM est un domaine où le pire côtoie le meilleur. J’ai vu de nombreuses relations BDSM de grandes qualités avec beaucoup d’amour tout autour de moi. Mais, je suis honnête, j’ai vu aussi un grand nombre de problèmes sur les 15 dernières années avec des personnes qui se réclament de ce milieu. Des manipulateurs/trices qui, sous le terme de Maître ou Maitresse, sont à l’origine de situations très malsaines.

Dans cette série, afin que vous puissiez vous épanouir en pleine conscience en sachant détecter les signaux faibles de risques, les points suivants seront abordés :

Nota: Pour des raisons de facilité dans les articles, j’utiliserais le terme Dom à la place de Maître ou Domina tout au long de l’article. Le terme Dom est genré masculin, mais je l’utilise de façon non genrée ici, de même pour Soum qui signifiera soumis ou soumise. Pour les spécialistes du BDSM, oui, un Dom et un Maître sont deux choses différentes, un ? Peut-on se soumettre avec consentement et perdre son libre arbitre par la suite dans le BDSM ? Cela tombe bien, c’est le sujet du prochain article…

L’influence inévitable des activités BDSM sur le libre arbitre

Pour ne pas alourdir cet article, je vous conseille de relire les articles précédents de la série si vous ne l’avez pas déjà fait. Ces articles posent les bases indispensables à la compréhension de cet article.

Les cadres de sécurité

L’importance de la sécurité dans le BDSM est illustrée par l’existence des cadres SCC (Sûr, Sain et Consensuel) et RACK (Risk-Aware Consensual Kink). 

Plus récemment (2014), un cadre alternatif plus sûr a été introduit, le 4Cs (Caring, Communication, Consent, and Caution). Le cadre 4Cs est censé conserver les concepts généraux de SSC et RACK tout en incorporant les dimensions interdépendantes du soin et de la communication.

On constate donc que la sécurité est un élément central de la démarche BDSM. Et l’ensemble de ces cadres, et à fortiori le 4Cs, me semblent de bons cadres pour assurer une relation BDSM de confiance et positive pour le Dom et le Soum. 

Néanmoins, on pourra remarquer que la communauté évalue souvent le respect de ces cadres à un moment donné (une session, ou au moment T), mais ne fait pas l’effort d’évaluer le respect de ces cadres avec une projection dans le temps, si ce n’est en répondant par les bonnes intentions du Dom sur le Soum. Ce qui évidemment biaise complètement l’évaluation.

Le consentement au démarrage de la relation

Le consentement est évidemment au cœur de la démarche de soumission. Dans la démarche BDSM, c’est le Soum qui demande au Dom (toujours, sinon il y a un vrai problème). La demande étant le premier acte de soumission du Soum.

Cela indique aussi que le consentement est bien présent lors de la demande, puisque c’est fait de manière libre, informé, spécifique, révocable et enthousiaste. 

Le consentement du début de la relation est donc confirmé et oui, on peut absolument consentir à la soumission.

Quid de l’obscurcissement de ce consentement dans le temps ? 

Nous arrivons sur le coeur de la problématique.

Nous avons vu dans les articles précédents, que, de manière systémique, le BDSM, notamment 24/7 est un lent processus qui va générer une dépendance affective potentiellement très forte, que ce soit avec un Dom bienveillant ou malveillant. Personne de sérieux dans le milieu ne minimisera la puissance de la dépendance créée lors d’une relation de ce type.

Par conséquent, même avec la plus grande bienveillance, le processus de mise en place de la dépendance intervient naturellement et de manière encore plus forte dans une dynamique de couple 24/7. Lisez les articles précédent pour comprendre comment cela se passe. En outre, la plupart des Dom n’ont aucune connaissance de ces phénomènes, ils les utilisent sans le savoir, ou avec très peu de connaissance de fond, dans la dynamique de leurs jeux et relations. Ils ne peuvent donc évaluer correctement l’effet de leurs actes sur le mental du Soum sur le long terme.

En miroir, les soumises ou soumis, se délectent du développement de cette dépendance affective et potentiellement physique (sexuelle) envers leur Dom à cause de la nature même du type de relation qu’ils/elle cherchent. Le Soum cherche à exister à travers la possession du Dom, car cela leur donne une existence, une image.

Je ne dis pas qu’il n’y a pas de sentiments réels d’amour et un lien fort en le Soum et le Dom, loin de moi cette idée qui serait totalement incorrecte. Mais ce sentiment est, a minima, renforcé de manière automatique par ces processus physiologiques sous jacents. C’est aussi pour cela que les soumis(es) trouvent autant de plaisir à obéir et à appartenir à leur Dom. 

En fait, le processus lent de mind control exercé par le Dom rend la personne soumise parfaitement heureuse de sa condition d’esclave. D’où la difficulté incroyable des personnes soumises à se séparer de leur Dom. Le lien créé est tellement puissant, que la séparation est souvent d’une violence infinie.

En conséquence, la vraie question que l’on peut alors se poser est qu’au bout d’un certain temps qu’en est-il du libre arbitre et du consentement après des mois puisqu’il est obscurci par le lien de dépendance mis en place

NXPL BDSM conditionnement

Le BDSM est-il donc mentalement abusif sur le long terme ? 

En préambule, quand je parle de consentement, je ne parle pas du consentement à un moment T mais du consentement dans le temps. De même, quand je parle d’obscurcissement de la capacité à retirer le consentement, je ne parle pas de cela au moment des activités ou de non capacité à exprimer les safe words. Je parle de la modification de l’état d’esprit du Soum, du résultat du conditionnement par le Dom, de la puissance de la dépendance créée qui puissent l’empécher de voir la situation telle qu’elle aurait été perçue sans cette dépendance.

Je pense que l’on peut écarter en grande partie que le BDSM soit abusif sur le long terme dans un cadre de play partner, pour moi, il n’y a pas assez de temps pour créer une dépendance qui soit si forte que le Soum ne puisse prendre du recul et se protéger d’un Dom malveillant. Dans un cadre de Dom bienveillant, il est démontré dans les études que la relation se base principalement sur une volonté d’expérimenter des sensations fortes, je ne vois donc pas de cadre abusif systémique possible sur le mental. Evidemment, il y aura toujours les cas particuliers.

La question est beaucoup plus prégnante dans un cadre 24/7 compte tenue de la dynamique intrinsèque du couple. Je ne pense cependant pas non plus que l’on puisse généraliser une réponse pour les couples 24/7. La grande majorité des Dom prennent soin de leur Soum, et comme dans un couple amoureux classique, le lien d’amour se renforce avec le temps. Un certain niveau de dépendance est normal dans tous les couples, BDSM ou pas.

Si on revient aux cadres, comment assurer que le “Sain” du SCC, le “Caring” du C4s soit évalué dans le temps et que le travail de soumission du Dom ne se transforme pas en conditionnement memtal abusif du Soum

Comment s’assurer qu’au bout d’un certain temps, la soumise ne soit pas en telle dépendance, qu’elle accepte tout de son Dom sans même avoir la volonté de retirer son consentement ?

On m’a témoigné de Soum qui acceptaient de se faire marquer au fer rouge pour appartenir à leur Dom (pratique extrème appelé “Branding” dans le milieu), comment peut-on arriver à un tel niveau de dépendance pour donner le consentement à cela ? Et surtout, dans l’optique de la reflexion de cet article, est-ce que la soumise aurait été consentante à cela sans le processus lent de conditionnement ? Je ne pense pas, d’où le questionnement sur l’abus mental du processus.

On peut faire le parallèle avec les démarches sectaires, considère-t-on que la femme qui entre consentante dans une secte et qui termine heureuse esclave sexuelle du gourou comme un abus ? Evidemment oui. Alors, pourquoi le même type de démarche serait-il considéré comme non abusif dans la communauté BDSM ? La question peut déranger et ébranle toute une partie de l’argumentaire des Dom. En quoi le processus de prise de contrôle d’un Soum est différent de ce qu’il peut se passer dans une secte. Les gouroux disent aussi vouloir le bien de leurs fidèles et aimer à la folie leurs femmes soumises à leur volonté.

Quand on voit un Soum, pleurer car on tient tête à son Dom, incapable de prendre le moindre recul et débordé par l’émotion de la simple remise en compte de son Dom. Peut-on assumer que le Soum était consentant à la création d’un tel lien de dépendance qu’il ne supporte même pas cela quelques années après le début de la relation ? Le processus qui a abouti a cela n’est il finalement pas un processus d’abus mental ayant positionné le Soum en état de faiblesse mentale ?

Conclusion et perspectives de reflexions

Je n’ai pas la réponse à ces questions, je les pose. Elles sont intéressantes, elles remuent les bases et les certitudes.

Evidemment, on peut fuir le débat d’un revers de la main. Je comprends de même que certain Dom ou Soum puissent être choqués du fait même de la question. Mais, je pense que poser ces questions permet aussi de faire avancer la réflexion sur la sécurité des cadres. Ces questions ci ne sont jamais posées et pourtant si importantes.

Tout ce que veulent la plupart des couples BDSM, c’est l’épanouissement dans la soumission/domination, créer un lien d’amour intense. Comment assure-t-on cet objectif positif tout en créant une dépendance affective de manière volontaire ou involontaire sans tomber dans l’abus ? C’est pas facile, vraiment pas facile, cela demande beaucoup beaucoup de recul, de travail sur l’égo, d’intelligence et d’intelligence affective.

Je vous laissent réfléchir à cela et commenter cet article ou en débatre sur la Sexosphere dans le channel #BDSM (le serveur discord de NouveauxPlaisirs).

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