#42390
bzo
Participant

je retrouve enfin mon corps,
les journées sont longues ces derniers temps,
beaucoup de travail, de soucis, de préoccupations,
aussi, en journée, je ne pratique plus trop

donc le soir, après la douche, bien propre, bien détendu, le ventre plein,
je retrouve enfin mon corps,
en journée, c’est juste ma monture, je n’y pense pas,
je lui donne à manger, j’y fais attention, bien sûr,
à l’occasion je vais chez un médecin avec
mais ce n’est pas la même chose,
le soir, je retrouve enfin mon corps, je suis avec lui, vraiment avec lui

nous autres, hommes modernes, nous ne savons plus être avec notre corps,
on s’est détachée de lui malgré qu’on en prend soin, qu’on fait du sport, du bodybuilding,
qu’il y a une sorte d’idolâtrie qui s’est mise en place
mais c’est juste le corps superficiel, le corps m’as-tu-vu,
le corps au-dessus de la surface, pas du tout la partie immergée de l’iceberg,
on va chez le dentiste, on va chez tout plein de spécialistes, pour le réparer, l’empêcher de tomber en panne,
l’aider à vieillir, nous donnez l’illusion qu’on vieillit moins
mais ce n’est pas cela être avec lui, tout cela

il faut regarder les enfants,
eux, ils sont tout le temps avec leur corps,
plus tard, à l’adolescence, ils vont apprendre à n’être plus que dans leur tête,
en attendant, ils enchantent le monde à tout instant,
en jouant avec leur corps et leur imagination

les hommes dits “primitifs”, les sauvages, eux aussi, ils sont constamment avec leur corps,
ils sont dans le ressenti, dans l’écoute de leur instinct,
ils perçoivent le monde avec les sens, avec leur chair, leur sang
plutôt que de réfléchir tout le temps à ce qui se passe,
voir le monde à travers le prisme de leur intellect,
de prendre leur distance avec leur tête par rapport au monde autour d’eux

réapprendre à écouter son instinct, ses pulsions, son désir,
se soumettre à sa chair, à son sang,
au moins le temps de la séance, sublime réappropriation de soi-même,
à notre portée,
retrouver la complicité qui permet toutes les magies, tous les enchantements,
emporté par le désir
qui s’est éveillé en mode majeur en nous