je me mets au lit pour une séance
qui dure en général d’une demie heure à une heure,
qu’une fois par semaine, en moyenne
et encore
j’adore ces moments, pourtant,
il y a tellement de jouissance et de volupté
qui passent dans les tuyaux
cependant, une fois par semaine,
cela me suffit largement
non, ce que je préfère,
ce sont ces courts moments,
parfois juste quelques secondes,
jamais plus de 3, 4 minutes,
un peu n’importe où, chez moi,
qui interrompent brusquement mon activité du moment,
n’importe laquelle
même si dans l’absolu, l’intensité ainsi vécue,
et la quantité de jouissance, de volupté,
non rien à voir avec ce que je peux obtenir au lit,
la démultiplication de ces moments quand je suis à la maison
et puis l’incroyable richesse et la variété des nuances de sensations
que je parviens à obtenir,
me satisfont amplement
ce sont essentiellement des moments de dégustation
et je suis un gourmet qui aime croquer lentement, lentement,
avec toutes ces papilles gustatives en alerte
parfois c’est aussi du rut pur, du coït bien bestial,
j’aime aussi, bien sûr
car en plus d’être un gourmet,
à mes moments perdus, je peux me montrer aussi peu regardant,
juste n’être plus qu’une bête assoiffée de pénétration, de chevauchée folle,
d’aller retour bien vigoureux, à faire tout trembler
et à faire décrocher la lampe du plafond
néanmoins, la plupart du temps, je suis dans la dégustation,
en trente secondes à une minute ou deux,
il y a tout un kaléidoscope de sensations qui passent en moi
et je tiens à goûter à chacune de ses nuances
mais ce n’est pas tout,
ces moments tellement fragmentaires,
me font vivre avec une intensité unique, remarquable,
la sensation de complicité, de communion, avec mon corps,
c’est tellement épanouissant, de ce point de vue,
l’impression de porter des fruits, d’être gorgé de soleil, de vent
d’être parcouru d’oiseaux, dans tous les sens,
le bonheur de vivre, exsude par tous les pores de ma peau,
dans ces moments-là
et enfin, dernière singularité
de ces sublimes instants d’intimité ardente avec mon corps,
c’est que contrairement à une séance au lit
où, en quelque sorte, on est dans une sorte de niche,
dans un monde totalement à part où la réalité n’existe plus trop,
qu’il n’y a plus que les corps qui exultent
dans mes petits apartés ardents,
c’est comme si la réalité dans laquelle je suis,
soudain se transformait,
me gardait entièrement en elle mais devenait magique,
le simple geste de prendre la tasse de thé,
semble devenir spécial,
tellement ornementé, tellement enrichi,
tellement mélodieux et dansant
vous voyez, j’espère, ce que je veux dire,
je suis ici, dans l’instant, bien arrimé à ce monde
mais un rideau semble, pour quelques instants, s’être déchiré
et la réalité laisse brièvement entrevoir,
des boyaux luisant comme des trésors
qui viennent me recouvrir, viennent m’entourer
important cela,
le monde , aussi, semble complice, incroyablement,
de ces moments,
j’ai l’impression que la table, les chaises, le plafond,
tous me font des clins d’oeil
quand je suis , ainsi, dans ces brèves envolées incandescantes, si spéciales